expand

Pourquoi les dirigeants vieillissent-ils plus vite ?

Ma question jette un froid. Les dizaines de paires d'yeux des dirigeants d'un grand groupe se scrutent mutuellement dans un silence gêné. Il s'agissait de savoir ce qu'ils avaient fait de concret pour développer leurs capacités managériales au cours de l'année précédente afin de renouveler leur pratique. Après quelques minutes d'échange, force est de constater que le sujet ne les a pas vraiment préoccupés. Seuls quelques-uns, sollicités par la DRH, ont participé à un programme « corporate » centré sur la stratégie et à une meilleure connaissance des différentes composantes du groupe.

L'entreprise semble considérer que plus on monte dans la hiérarchie, moins on a besoin de se développer. Tout au plus certains suivent un coaching à un moment de leur carrière qui devient ensuite un alibi pour les cinq ou dix ans qui suivent. Les moins exemplaires sont les boss eux-mêmes auxquels il paraîtrait incongru d'avoir un plan de développement, comme s'ils n'avaient que ça à faire !

En somme, à partir d'un certain niveau hiérarchique et d'âge, on vit sur ses acquis. Tout entier plongé dans son activité quotidienne pour laquelle il s'est rendu indispensable, le dirigeant s'enferme dans un agenda sans disponibilité. En fait, c'est une façon pour lui de rester strictement dans sa zone de confort et d'essayer de se valoriser au mieux. Que dirait-on de celui qui a du temps et qui le consacrerait à s'améliorer ? Qu'il accepte l'idée de ne pas être abouti et par là même reconnaît son imperfection ou simplement que sa tâche lui laisse ce loisir ? Dans les deux cas, le personnage dénote, voire suscite de la méfiance.

En fait, cette absence de travail sur soi conduit le dirigeant à devenir, avec le temps, une caricature de lui-même. Tout le conforte dans son quotidien à se limiter à sa pratique habituelle et à s'autorenforcer dans ses propres convictions.

Or, là est l'enjeu : remettre en cause ses convictions et enrichir ses comportements. Par définition, ses convictions sont le fruit du passé, s'il n'en acquiert pas de nouvelles (sur lui-même et son mode de management), il est un homme du passé. Son outil de travail au quotidien, ce sont ses comportements. Et la caractéristique de l'efficacité comportementale est de pouvoir en utiliser le plus large spectre possible. Ce qui suppose des exercices d'assouplissement comportemental réguliers consistant à limiter ses comportements réflexes pour élargir sa palette. Plus que tout autre, le dirigeant a un risque de vieillissement comportemental accéléré, d'ailleurs, ce n'est pas à son âge…