Osez la bienveillance ! Le 13 novembre, le magazine Psychologies organise la quatrième Journée de la gentillesse, un rendez-vous annuel déjà présent dans 19 pays. A cette occasion, plus de 300 sociétés ont signé la "Charte de la bienveillance au travail " et plus de 400 000 salariés se sont estimés concernés par cette mobilisation, réitérée avec succès pour la deuxième année.
En ces périodes troublées, Eric Albert (1) rappelle que la bienveillance n'est pas une valeur ringarde, mais au contraire une preuve d'intelligence. Il commente le texte de l'" Appel à plus de bienveillance au travail " auquel il a participé avec des patrons, syndicalistes, DRH, coachs. Il met en avant quelques bonnes pratiques managériales qu'il préconise à ses clients et met lui-même en oeuvre dans son cabinet, où exercent 40 consultants. Pourquoi ne pas vous inspirer ?
Respecter la personne avant la fonction
Nous vivons une période de crise où les employeurs font comprendre ou disent explicitement à leurs salariés : " Estimez-vous heureux vous avez du boulot ! Vous n'êtes pas encore sur le carreau. " Cela crée un rapport de forces nocif qui n'est pas propice à la performance dans l'entreprise. Un manager doit avoir de la considération pour chacun de ses collaborateurs. Respecter un collaborateur, c'est respecter une personne avant de respecter une fonction dans la hiérarchie. Je trouve qu'il serait intéressant d'assujettir une partie de la part variable de la rémunération des managers à la bienveillance dont il font preuve à l'égard de leurs collaborateurs. Inversement, je constate qu'il y a des salariés qui n'ont aucun respect envers leurs dirigeants. Ils en parlent de manière brutale, agressive et néfaste. Des rumeurs malveillantes circulent. L'absence de bienveillance est un état naturel qui existe en chacun de nous. Il convient de nous en corriger, surtout dans les moments où nous sommes sous tension, stressés, paralysés par les difficultés.
Créez du lien et de la solidarité
L'individualisme est exacerbé dans l'entreprise. Les salariés sont mis en compétition et deviennent des rivaux. J'estime que ce mode de management est contre-productif. C'est au dirigeant de cultiver l'esprit d'entreprise. Dan mon cabinet, je favorise la solidarité, l'entraide, la création de liens. La bienveillance passe par un soutien social, des gens disponibles pour écouter un collaborateur en souffrance. Lorsqu'un salarié aide un autre salarié, il ne perd pas sont temps. Le fait de donner sans rechercher un retour sur investissement fait avancer tout le monde dans la bonne direction.
Cultivez bien-être et efficacité
J'ai la chance de travailler dans de beaux bureaux dans le 8ème arrondissement de Paris. Je pense que j'y réfléchis mieux, que je suis plus performant que dans un minuscule bureau. " Charité bien ordonnée commence par soi-même ". Un patron qui ne prend pas soin de son confort ne peut pas prendre soin de celui de ses salariés. Et c'est inquiétant ! A l'Ifas, j'ai mis en place des cabines téléphoniques et des salles de réunion afin que mes collaborateurs puissent s'isoler lorsqu'ils le désirent. Par ailleurs, je suis très souple sur les horaires de travail, sur la possibilité de travailler de chez soi. J'évite les e-mails et appels téléphoniques hors du temps de travail. Un collaborateur ne doit pas se sentir tenu de travailler le dimanche...parce que son boss travaille ce jour-là. J'estime indispensable un équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle. Les crèches, les services de conciergerie, les transports organisés par l'entreprise contribuent au bien-être des salariés. Certaines sociétés vont encore plus loin en proposant des programme d'arrêt du tabac, de prévention de l'obésité. Mais le paternalisme est mort, vive la bienveillance !
Favorisez la gouvernance
A mon sens, la toute-puissance de l'actionnaire n'est plus viable. Le modèle capitaliste a montré ses limites. Mais l'entreprise n'est pas une démocratie. Alors, quelle voie médiane choisir ? J'aime citer en exemple Essilor, dont l'actionnariat salarié est regroupé au sein d'une association qui est présente au conseil d'administration. Nous pourrions avoir plus de sociétés qui intègrent des administrateurs salariés si les représentants des salariés sortaient d'une posture idéologique. Par ailleurs, l'égalité entre les hommes et les femmes à des postes de dirigeant et d'administrateur me semble une évidence. La mixité des origines professionnelles est également importante. A l'Ifas, nous avons recruté un général à la retraite, des débutants et des personnes de plus de 50 ans, des diplômés d"écoles de commerce, des psychologues, des ingénieurs... De la diversité culturelle émerge les bonnes idées, la créativité.
Formez-vous au développement personnel
Diriger une entreprise est un métier qui n'est pas simple. Bon nombre de dirigeants ne perçoivent leur rôle qu'en fonction des tâches à accomplir. Ils sont dans le " faire faire ". Mais pour obtenir de bons résultats, ils ont tout intérêt à travailler leur " savoir-être " avec un coach ou dans le cadre de formation en développement personnel. Et cela, tout au long de leur vie professionnelle. Je suis bien placé pour l'avoir mis en application sur moi-même ! Si l'on considère que l'on a atteint son niveau optimal, c'est que l'on a loupé quelque chose. On n'en finit jamais d'améliorer son comportement.
Corine Moriou, L'Entreprise
(1) Son dernier ouvrage : Le Management en questions. Les réponses d'Eric Albert, Ed Eyrolles
Pour en savoir plus : http://journée-de-la-gentillesse.psychologies.com onglet : " Appel à plus de bienveillance au travail. "
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