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Expert ou manager ?

La Grèce et l'Italie ont fait le choix de mettre à leur tête, non pas un homme politique, mais un expert. Cette alternative se pose souvent en entreprise : faut-il donner la responsabilité d'une entité à celui qui est le garant de la technique ou à celui qui sait manager ? On cherche toujours la perle rare qui est censée combiner les deux. Mais la base du savoir-faire et surtout les ressorts de la légitimité ne sont pas les mêmes. Le premier est jugé sur la qualité de ce qu'il produit personnellement quand le second l'est sur sa capacité à faire faire aux autres. En situation complexe, il est rassurant de savoir l'expert aux manettes. Lui seul pourra trouver ou choisir la bonne solution. Il pourrait, en revanche, avoir plus de difficultés à mettre en oeuvre, à organiser, à entraîner les équipes et à susciter l'enthousiasme. L'expert est, par essence, tourné sur lui, son savoir, sa production. Développer des compétences managériales est quasiment à l'opposé de ses préoccupations et de ce sur quoi il doit se centrer pour rester un bon spécialiste. A l'inverse, le manager doit, lui, renoncer à être meilleur technicien que ses équipes pour les pousser à se dépasser et à être efficaces. Son risque est de renoncer à comprendre les domaines qui lui sont moins familiers. C'est fréquent chez les dirigeants à l'aise dans leur expertise de base mais moins dans d'autres champs comme l'informatique par exemple. Ils s'en remettent alors totalement aux experts et n'ont plus la capacité de prendre les décisions. On l'aura compris, s'il est rare de trouver un bon expert manager, il est indispensable d'avoir des managers qui font l'effort de comprendre dans le détail l'ensemble des expertises qu'ils chapeautent. L'efficacité de l'entreprise repose en grande partie sur cette articulation entre experts et managers. Elle nécessite que chacun s'identifie et tienne compte de ses propres limites. Elle suppose que l'un et l'autre apprennent à se respecter et à s'écouter. A l'expert de prendre le leadership sur ce qui est techniquement souhaitable. Au manager de montrer jusqu'où c'est faisable et d'en conduire la mise en oeuvre. Passer de la toute puissance à l'interdépendance nécessite une vigilance permanente.