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Dirigeants : jusqu'où s'accrocher ?

La même semaine ou presque, un patron du CAC 40 et le pape ont annoncé leur décision de quitter leurs fonctions. L'un a quarante-cinq ans et laisse une entreprise au mieux de sa forme, l'autre était élu à vie. Dans les deux cas, même réaction des observateurs : d'abord la surprise, puis un hommage.

Il n'est pas banal de renoncer à ce qui vous est acquis et notamment à une position de pouvoir.

Ca l'est encore moins lorsque, pris par les responsabilités, le travail a pris une telle place dans la vie qu'il reste peu de choses à côté. Statut social, relations aux autres, centres d'intérêt, intensité émotionnelle, tout se passe au travail. C'est ce qui s'appelle être captif. Il ne s'agit pas d'argent mais de tout ce qui donne le sentiment d'exister. Après tout, en quoi être entièrement dédié à son travail est-il problématique ? Cela donne des dirigeants entièrement impliqués, disponibles en permanence et qui mettent toute leur énergie dans leur mission. Et cette dépendance au travail les oblige à réussir car rien n'est pire pour eux que d'être éjectés de leur job. Deux hypothèses. Soit ils confondent leur sort à celui de leur entreprise et s'installent dans un rapport fusionnel. Dès lors, tout ce qui s'oppose à eux est une attaque contre l'entreprise, s'ils la dirigent, ils tombent volontiers dans la toute-puissance et la paranoïa. Soit c'est leur intérêt propre qu'ils gèrent avant tout. Leur seul sujet est de durer et pour cela de jouer de diplomatie, de ne pas faire de vagues et de s'occuper principalement de leur image et des rapports de force. Leur discours est parfait pour démontrer leur utilité pour l'entreprise.

Mais au-delà du discours… Personne, bien sûr, ne se reconnaît dans ces caricatures. Pour autant, chacun d'entre nous a une forme de dépendance vis-à-vis de son travail. Nous en sommes plus ou moins conscients. Plus elle est présente, moins nous acceptons la remise en cause, vécue comme une menace. Refus de voir nos limites et donc incapacité à progresser. La dépendance nous aveugle et nous fige. Laissons le mot de la conclusion au pape, lors d'une homélie récente : « Moins nous chercherons notre gloire, plus notre témoignage sera incisif. »