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Succession

La presse s’est fait l’écho de la succession à la tête de Sodexo du père par la fille. Chacun a souligné les modalités bien préparées de ce passage de relais qui garantit une continuité familiale à la tête d’un grand groupe qui est une fierté française. De fait, cet événement mérite d’être salué, car rien n’est plus difficile à réussir qu’une succession.

Celui qui part vit d’abord une fin et une rupture. Ce moment le ramène à l’évidence qu’une grande part de sa vie est derrière lui. Physiquement, il quitte son entourage qui parfois l’a accompagné depuis de longues années. Ce deuil est toujours chargé de tristesse. S’y ajoute la perte de pouvoir et de statut social. D’un seul coup, celui dont les avis et les décisions avaient un poids perd cette capacité d’influence. Il est perçu plus par son passé que par son présent. Pire encore, il va être comparé à son successeur. Sauf que le successeur, étant aux manettes, a sa performance devant lui, alors que le partant ne peut plus que constater ses succès et ses erreurs révolus. La tentation est grande de choisir un successeur qui ne fasse pas d’ombre, car de toute façon l’entourage comparera.

Pour l’arrivant, c’est une autre forme de choc. Alors qu’il débute, tous vont l’évaluer sur ses premiers pas. L’impression qu’il donne au départ pourrait lui coller à la peau longtemps. Il est observé sur sa façon de se positionner.

Tout est donc fait pour mettre les protagonistes en rivalité l’un avec l’autre. Rivalité diachronique où l’un ayant fini ne peut plus que commenter et l’autre étant actif a le pouvoir de défaire ce qu’a fait son prédécesseur.

A chacun de trouver la bonne posture pour réussir une succession. Cela suppose d’accepter que l’on est avant tout un passeur. Le dirigeant influe le cours d’une histoire dont il n’est qu’un des acteurs. Tant son entourage que les commentateurs le poussent à se considérer comme celui dont tout dépend, qui porte tous les mérites des succès et les opprobres des échecs. Rien n’est plus dangereux que cette toute-puissance. Elle le conduit à tout centraliser tant qu’il est aux manettes et à ne pas supporter de les lâcher. Au risque de gâcher sa sortie.