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Le facteur humain parent pauvre des PSE

Face à la crise économique, faut-il être fataliste et se résigner à voir une augmentation de la souffrance ? L'impact d'une restructuration a fait l'objet de recherches notamment sur ses effets (négatifs) sur la santé des salariés. Le rapport européen HIRES (1) est une synthèse des données scientifiques sur les effets des restructurations sur la santé. Le constat qu'il en ressort est le manque de connaissances spécifiques sur le sujet. Néanmoins, on sait que les restructurations ont un impact sur la santé de ceux qui restent au chômage.

Impact sur la santé et perspectives

Les conséquences sur la santé régulièrement citées sont multiples : le taux de cortisol croissant, la détresse psychologique, la dépression ou l'anxiété, les problèmes cardiovasculaires, les troubles musculo-squelettiques, les changements de comportement en termes de santé (addictions, régime alimentaire médiocre, manque d'activité physique, troubles du sommeil, etc.)... A l'avenir, si l'on veut mettre en place des dispositifs de mesure des effets des restructurations, notamment sur les RPS (Risques Psychosociaux), il s'agira de sélectionner différents indicateurs (taux d'accidents, d'absentéisme, de morbidité et de mortalité, anxiété, dépression, bien-être, etc.). Pour pouvoir établir des liens entre les restructurations et la santé des salariés, ces indicateurs devront être étudiés pendant les différentes phases de la restructuration, à savoir avant, pendant et après la restructuration.

Ne pas sous-estimer le stress des " survivants "

Globalement, la perte d'un emploi augmente le stress, mais les restructurations ont également des conséquences sur les salariés qui restent dans l'entreprise après la restructuration, les " rescapés ". Même s'il y a peu de données sur les effets de restructurations sur la santé des " rescapés ", ils ne font cependant aucun doute : certains chercheurs parlent de " syndrome du survivant (2) " (ou du rescapé) des licenciements. Ces rescapés rapportent davantage de stress que les " victimes ". En effet, les rescapés se retrouvent souvent avec une charge de travail accrue et par conséquent, une réduction des moments de récupération face aux contraintes à la fois mentales et physiques du travail. En complément de la charge de travail, il porte une charge émotionnelle supplémentaire : la culpabilité vis-à-vis des sortants " pourquoi moi je suis resté et pas l'autre ".

Contexte, environnement et perspectives

Les dirigeants pour la plupart aux services des actionnaires sont inquiets quant à l'avenir et la crise actuelle pousse toutes les entreprises à réduire leurs coûts. C'est ainsi qu'à l'issue des résultats publiés des entreprises du CAC 40, 80% ont décidé de réduire les coûts alors que leurs résultats 2012 ne le justifient pas pour autant ! En effet, 80% des entreprises ont réalisé un chiffre d'affaires 2012 en croissance et 53% un résultat en croissance. Ces plans d'économie passeront en particulier par la réduction de leur masse salariale.

Fatalisme ou volonté d'agir ?

La plupart du temps, les entreprises qui mettent en place des PSE, s'occupent des plans d'accompagnement des " sortants ", mais que proposent-elles pour les salariés restant ? Trois axes permettent de mieux prendre en compte le facteur humain. En premier lieu, en amont d'une restructuration, mesurer les impacts humains sur la santé des salariés permettrait de mieux prévenir les risques psychosociaux. En deuxième lieu accompagner les managers à pouvoir faire face à deux dimensions centrales dans un PSE : Identifier et savoir faire face à des salariés en difficultés d'une part et mobiliser les équipes en périodes d'incertitudes sont les deux ingrédients majeurs pour améliorer la prévention. Enfin, mettre en place un réseau efficace d'acteurs internes de préventeurs ou référents, permet là encore, d'accompagner les salariés dans une période de transition qui peut être vécue comme déstabilisante.

Une lueur d'optimisme

Enfin, certaines entreprises, plus résilientes, ont décidé de ne pas courber l'échine et cherchent concrètement à mettre des plans de prévention efficace. Le constat est positif, malgré la crise, le stress baisse quand les entreprises s'en occupent. Après 10 ans d'observation on constate que la mise en place d'OMSAD (Observatoire Médical du Stress de l'Anxiété et de la Dépression) dans le service de santé au travail des entreprises a pour effet une diminution progressive et durable du stress des salariés.

 

Par Laurence Saunder, dirigeante du cabinet IFAS, cabinet adhérent de Syntec Conseil en Management, dans Revue RH&M

 

(1) Health In Restructuring; (2009)

(2) Noer (1997)

 

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