Le contresens du télétravail – Éric Albert

Après Amazon, Google et plus près de chez nous Société Générale ou Free, c’est au tour de Novo Nordisk, laboratoire pharmaceutique danois réputé pour promouvoir l’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle, d’exiger un retour de 5 jours par semaine. Il est à noter que ce changement s’inscrit dans le cadre d’un plan performance. Le télétravail est donc considéré comme ne la favorisant pas.

Ce mouvement de balancier fait suite à celui, après le Covid, qui marquait un enthousiasme et notamment de la part de certains patrons, pour le travail à distance. Surpris par l’absence de baisse de productivité pendant les différents confinements, ils ont vu une opportunité pour réduire leur surface de bureaux et faire des économies substantielles sur les frais de siège. Ils ont encouragé leurs DRH à signer des accords donnant une grande liberté d’usage du télétravail. De leur côté, une partie des salariés, notamment les plus jeunes, ont saisi l’occasion pour organiser leur vie à distance de leur travail en s’impliquant peu. Synonyme de liberté, cette possibilité qui leur est offerte (ou pas) est déterminante dans le choix d’un poste.

Erreur de part et d’autre. Il y a beaucoup d’inconvénients à un télétravail massif. Notamment celui du délitement de la communauté de travail. Il produit à la fois une baisse de l’affectio societatis, une perte du plaisir relationnel et du soutien mutuel entre les acteurs. Ce qui donne des salariés moins engagés mais aussi plus fragiles face aux risques psychosociaux.

Faut-il pour autant renoncer au télétravail pour revenir à un présentiel complet ? Cela parait, à juste titre, aux salariés comme un retour en arrière digne du siècle dernier. En effet, le télétravail est l’un des paramètres essentiels de l’équilibre de vie. Il repose sur l’alternance de journées sur place avec les collègues favorables au travail collectif et celles de journées chez soi plus propices à la concentration et qui évite les transports.

En fait, ce que l’entreprise n’a pas suffisamment travaillé, c’est l’évolution du management. Il faut d’abord rappeler des règles essentielles. Le télétravail suppose d’être joignable et disponible, par exemple il ne peut pas se faire d’un train. Ensuite, il faut organiser les moments collectifs présentiels en imposant des plages de présence à tous. Au cours de ces moments, il est nécessaire d’appliquer des méthodes rigoureuses pour stimuler l’intelligence collective. Enfin, il est indispensable de rappeler à chacun qu’il doit contribuer à la dynamique collective.