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Est-ce qu’on donne assez envie ? - Eric Albert

Choose France réunit à Versailles tous les investisseurs potentiels sur le territoire français en grande pompe. Rien n’est trop beau ni prestigieux pour donner envie de notre pays aux étrangers. Et de fait, c’est l’un des domaines où la stratégie gouvernementale semble porter ses fruits puisque depuis plusieurs années nous sommes le pays qui attire le plus de projets d’investissement.

Dès lors, on peut s’interroger pourquoi ce ressort parfaitement identifié et qui marche n’est pas plus souvent utilisé. Car dans la plupart des situations, on fait appel au ressort opposé qui est la contrainte. Dès qu’on a la possibilité de l’activer, il parait plus économique en efforts et plus rapide d’imposer une règle, une procédure, une loi qui fixe le cadre de l’imposition.

En somme, la France considère les investisseurs étrangers comme ses clients et gère ses fonctionnaires et ses concitoyens par la contrainte.

Les entreprises, pour la plupart, ont compris à quel point le ressort de donner envie ne devait pas se limiter à ses clients et à ses actionnaires. Reste que dès qu’un acteur se trouve en position de pouvoir, son premier mouvement est de l’utiliser pour imposer. C’est vrai vis-à-vis des collaborateurs mais aussi vis-à-vis des fournisseurs qui se sentent souvent captifs.

Ne soyons pas naïfs, donner envie ne dispense pas de règles qui permettent de disposer d’un cadre commun. Ce cadre doit être un espace de liberté à l’intérieur duquel les acteurs peuvent trouver de la marge de manœuvre. Mais souvent, c’est l’inverse. Il décrit par le menu ce que chacun doit faire pour chercher à automatiser ses plans d’actions et ses comportements. Ce qui revient à le dispenser de réfléchir. Pour les acteurs, l’enjeu principal consiste à s’abriter derrière la règle et la finalité tient dans le respect du cadre.

Les dirigeants doivent intégrer que dès qu’ils cessent de donner envie à l’ensemble de leurs parties prenantes, ils cèdent à la facilité et font preuve de paresse. C’est certes plus compliqué car cela demande d’entrer dans les ressorts psychologiques des acteurs et de partir de là où ils se trouvent. Et ce n’est pas pour autant qu’il faut répondre à toutes leurs attentes ou revendications.

Il peut être utile de garder en tête que dans toute situation où l’on dispose d’un pouvoir sur les autres, s’interroger sur la façon dont on leur donne envie relève du bon exercice de ce pouvoir.