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Faire progresser son boss – Eric Albert

Il est comme ça ! Sont-ce les excès largement médiatisés du duo Trump/Musk ? Mais il semble que la tendance est aux boss volontiers autoritaires voire tout puissants. Comme s’ils se sentaient libérés pour déverser leur hubris sur les organisations qu’ils dirigent.

Rien d’évident pour leurs collaborateurs directs. Ceux-ci sont malmenés au gré des humeurs, des préoccupations ou des frustrations de leur patron. S’ils décident de rester dans leur job, ils ont à encaisser et à gérer les vagues émotionnelles. En réalité, souvent ils sous-estiment à quel point ils sont affectés. Mais ils se résignent en se trouvant de bonnes raisons pour continuer dans un job qui pourtant les mine.

Le risque principal réside dans cette résignation. Elle conduit les acteurs à ne plus faire de feedback au boss. Soit parce qu’ils ont essayé et cela s’est mal passé, soit parce qu’ils ont décidé qu’il resterait tel qu’il est, quoiqu’il arrive. Comme toujours renoncer à faire un feedback est confortable à court terme car cela évite de se confronter. Mais c’est toxique à moyen terme car cela n’offre pas d’autre alternative que d’attendre le prochain choc. La conviction s’installe fréquemment que c’est inutile car l’intéressé ne changera jamais.

Ce feedback doit porter sur l’effet produit et non pas sur ce qui saute aux yeux et qui brûle les lèvres : le comportement caricatural. Décrire le comportement conduit souvent à des réactions de rejet, alors que faire réfléchir sur en quoi l’effet produit n’est pas celui recherché, donne plus de chance d’avoir une écoute. Surtout si l’interlocuteur comprend qu’il s’agit de son intérêt propre. Certes, si les collaborateurs ont peur, ils s’exécutent. Mais dans quelle mesure vont-ils lui cacher la vérité ?

Les collaborateurs directs se font une raison : le boss « est comme ça ». Et d’ailleurs lui-même le sait déjà, donc c’est inutile, voire dangereux, de le lui répéter. C’est là leur erreur. D’abord parce qu’en explicitant ce qui est implicite on sort du non-dit. Ensuite, car à force de rien renvoyer à l’intéressé, il minimise les effets qu’il produit sur les acteurs et banalise son comportement. Même si en apparence le feedback est balayé ou sans réponse, il est exprimé et, plus souvent qu’on ne le croit, il fait son chemin.

Faire des feedbacks à son boss est une preuve de loyauté à son égard. La plupart des patrons le savent et respectent ceux qui continuent de le pratiquer même si ce n’est pas agréable à entendre.