expand

De quelle responsabilité parle-t-on? - Eric Albert - Les Echos

Responsabilité. Jamais nous n'aurons autant entendu ce mot dans les médias que récemment. Il est affublé du terme « pacte ». Le choix de langage par le gouvernement renvoie les entrepreneurs à un concept qu'ils affectionnent particulièrement.

Mais si on a besoin d'un pacte, c'est que la responsabilité ne va pas de soi. Pourtant, à travers lui, les uns et les autres se reconnaissent comme tels. Mais tout le sens est perdu lorsqu'il s'agit de contreparties. Elles visent à contraindre ceux en qui on n'a pas confiance. Les moyens du contrôle sont d'emblée mis en oeuvre, car le doute domine. Comme ils ne seront pas responsables, mettons-les sous contrainte !

Il est dommage que ce sujet de la responsabilité, qui est si important, soit à ce point gâché à l'occasion de ce « pacte ». La responsabilité, c'est le coeur de ce que recherche tout manager dans sa relation avec ses collaborateurs. Lorsque ceux-ci montrent qu'ils en ont le sens, et qu'elle les guide dans leurs actions au quotidien, le principal est là. La vraie question est : comment la susciter ?

Comme souvent, le premier frein est soi-même. Il s'agit de sortir du cercle piégeant, où le défaut de responsabilité constaté induit, d'une part, une méfiance et, d'autre part, une attitude dirigiste. Lorsqu'un collaborateur ne se montre pas responsable, le manager prend sur lui la charge mentale de la réalisation de la tâche. C'est maintenant lui qui doit garantir que les choses seront faites. Cela le rend légitime pour dire comment et de quelle façon elles doivent l'être. Dès lors, donner des ordres et contrôler deviennent des activités régulières. En face, la déresponsabilisation est à la hauteur de ce qui est pris par le manager. Seule question qui demeure : ne pas se faire prendre en défaut par le chef. Peu à peu, chacun s'installe dans ce mode relationnel. Régulièrement, le manager est relancé pour déléguer davantage et, à chaque fois qu'il essaye, il trouve des failles qui le confortent dans le maintien du statu quo.

Comment en sortir ? D'abord en partageant un objectif avec ceux que l'on souhaite responsabiliser. Ensuite, en acceptant que la prise de responsabilité se fasse avec des loupés. Enfin, en les utilisant comme autant d'occasions de progrès. La responsabilité est d'abord une démarche relationnelle où l'on renonce au rapport de force pour partager les risques. Ne laissons pas galvauder ce beau mot.