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Pas de bonnes intentions sans bon sens – Eric Albert

Le parlement, depuis quelques jours, fait preuve d’une grande créativité. Il multiplie les propositions pour trouver des nouvelles recettes à un budget chroniquement déficitaire. Nul doute que les intentions, qui souvent font référence à la perception de justice fiscale, sont sincères. Il leur manque l’essentiel : le bon sens et le pragmatisme qui peuvent les rendre opérationnelles sur le terrain et surtout efficaces.

L’entreprise est par nature plus pragmatique. Elle met en place des garde-fous en systématisant les mesures et les évaluations des actions mises en place. Pour autant, elle n’est pas à l’abri de cette déconnexion.

La bonne intention n’est pas seulement de faire le bien ou d'améliorer ce qui dysfonctionne. Il peut s’agir d’avoir la meilleure technologie, ou encore de présenter un projet parfait. La bonne intention répond à un schéma mental qui renvoie à des valeurs ou un idéal. Il faut être équitable, il ne faut pas faire d’erreurs, il faut améliorer ce qui marche mal, il faut présenter un projet abouti, etc. Derrière ces principes qui s’imposent comme des évidences, de très nombreuses actions sont lancées. Prenons l’exemple des chartes managériales. Elles sont presque toujours très complètes et pleines de bons principes. Dans la pratique, force est de constater qu’elles ne servent pas à grand-chose : le management n’évolue pas vraiment après qu’elles ont été rédigées. D’ailleurs, au bout de quelques années, elles sont oubliées jusqu’à la prochaine. Ailleurs les bonnes intentions visent à anticiper ce que veut le chef. À partir d’une réflexion ou d’un commentaire, les équipes qui cherchent à satisfaire le boss, se lancent dans des actions parfois déconnectées de la réalité du terrain.

Rien n’est plus dangereux qu’une bonne idée sans lien avec le bon sens. Elles donnent lieu à des process inapplicables, à des injonctions contradictoires et parfois aboutissent exactement à l’opposé du principe qu’elles cherchent à atteindre. Celui qui produit l’idée se fait plaisir, il est satisfait d’avoir lancé une action qui, dans le principe, permet de corriger un problème. Les fonctions sont plus exposées à ce type de risque. Leur pouvoir régalien les pousse à fixer les règles ou à imposer des process qui peuvent être inapplicables pour certaines entités.

Le rôle du dirigeant est de veiller en permanence à ancrer dans le concret les idées ou les initiatives de ses équipes. Son propre bon sens est une corde de rappel de son organisation.