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Pourquoi y a-t-il tant de crises?

L'affaire de Chypre laisse l'honnête homme pantois.

Un beau matin, on apprend que les banques en faillite envisagent de prélever une part des sommes déposées chez elles. On peut supposer que le gouvernement chypriote et les autorités européennes de la zone euro connaissaient la situation depuis longtemps. Ils savaient aussi l'étendue des conséquences en inquiétude et souffrance pour les populations, en tensions entre les acteurs, en perte de confiance et en coûts. Comment se fait-il que ceux qui savent qu'une crise se profile et qui ont les manettes pour l'enrayer la laissent se produire ?

Dans l'entreprise aussi, on laisse les crises survenir. Toutes ne sont pas prévisibles mais la plupart ont des signaux annonciateurs. On peut choisir de ne pas les voir ou les ignorer. Pris dans la gestion du flux au quotidien, chacun a toutes les bonnes raisons pour éviter de se confronter à un problème futur. D'autant qu'il est, par définition, complexe. On reporte un licenciement qui va être source de diverses complications, on laisse se dégrader des relations au sein d'équipes, on ne se donne pas les moyens de trouver les bonnes mesures correctives à une activité en déclin.

Chacun a sa zone d'évitement. Pas seulement parce que ces sujets sont chargés émotionnellement et compliqués, et qu'ils s'ajoutent à un quotidien déjà chargé. Mais aussi parce qu'étant multifactoriels et impliquant de nombreux acteurs, le jour où la crise se déclenche, il n'y a pas de responsable unique. En somme, faire l'autruche, n'est pas un mauvais calcul. Car celui qui soulève le problème qui ennuie tout le monde et qui a donc tendance à être minimisé est rarement bien accueilli. Pis encore, si malgré tout il s'acharne et réussit à prévenir le risque, il n'est pas du tout sûr que son action soit valorisée à sa juste mesure : il a empêché quelque chose qui n'est pas arrivé et dont on ne mesure pas ou mal les conséquences éventuelles. Alors que le pompier apparaît comme un sauveur, celui qui prévient est un gêneur.

La capacité à identifier les signaux de dysfonctionnement et la persévérance à prévenir les crises devraient être l'un des critères de sélection des futurs dirigeants.