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La discipline ou l’initiative ?

Lors de son séminaire annuel « au vert », le débat au sein du Comex est animé.D'un côté, ceux qui pensent qu'il faut obtenir des collaborateurs davantage de discipline, de l'autre ceux qui insistent sur le manque d'initiatives. Les premiers font valoir l'immense déperdition entre la décision et sa mise en œuvre : « La discipline est la force des armées, c'est ce qui leur permet d'avancer en ordre, on en est loin ! » Les autres déplorent une organisation stérile et démotivée d'où ne remonte aucune idée :« Si nous utilisions ne serait-ce qu'une petite part de la force d'initiative de nos équipes, l'entreprise retrouverait un dynamisme qui lui manque cruellement. » Chacun finit par reconnaître que les opinions des autres sont fondées et il est décidé que l'année serait marquée par le double message de la discipline et de l'initiative.

Les deux points de vue portent évidemment une part de vérité. Pour autant, les communiquer simultanément revient à envoyer un message contradictoire dont l'effet ne peut être qu'inefficace et source de tensions. Ainsi, le collaborateur bien discipliné se verra reprocher son manque d'initiatives et réciproquement. Derrière ce débat, tranché par un faux compromis, se dissimulent des modèles implicites d'efficacité collective radicalement opposés. Celui des tenants de la discipline repose sur l'hypothèse que ce qui fonctionne le mieux est pensé par le haut et bien exécuté par le bas. Pas besoin de s'étendre en explications, il suffit que chacun comprenne bien ce qu'il a à faire et le fasse. Ils fractionnent le travail sur un modèle taylorien et le régule en multipliant les process. Ces organisations fonctionnent très bien dans les « business models » low cost où il s'agit de fournir un produit ou un service au plus bas prix possible par des salariés peu qualifiés.

Les promoteurs de l'initiative font au contraire le pari de l'intelligence du terrain et de son adaptation aux spécificités de la situation. Leur hypothèse est que les process ne peuvent pas tout prévoir et que rien n'est plus efficace qu'un collaborateur auquel on donne de la marge de manœuvre s'il a bien compris les enjeux globaux de l'entreprise. Ce fonctionnement est indispensable aux « business models » à haute valeur ajoutée qui supposent de s'adapter au client et d'innover. C'est sur ce choix entre l'un ou l'autre des « business models » que le débat aurait dû porter. Mais le Comex aurait-il tranché ?