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Le chef a dit… – Eric Albert

Il est fréquent qu’un ministre dise le contraire du Président ou du Premier Ministre. Ces pratiques montrent une dégradation de l’autorité des plus hauts responsables de l’état qui, s’ils veulent s’imposer, doivent prendre une posture autoritaire.

En entreprise, l’autorité du chef est si présente qu’elle est utilisée comme un parapluie par les équipes : le chef pense que, le chef a dit, le chef attend que. Sésames pour la mise en action immédiate de tous les acteurs tournés comme un seul homme vers la satisfaction des desiderata supposés du boss. Ce fonctionnement a plusieurs conséquences. La verticalité du système paralyse la prise d’initiative. Personne ne se risque à se lancer puisqu’il est implicitement admis que l’enjeu principal est de plaire ou du moins de ne pas déplaire. Mais comment être sûr qu’on a bien interprété les attentes du chef ? Comme on n’ose pas toujours lui demander des précisions, on suppose. L’exercice d’exégèse mobilise un temps important des acteurs et induit toutes sortes d’actions censées répondre aux attentes. Les chefs d’entreprise, dans leur grande majorité, ne souhaitent pas ce mode de fonctionnement. Ils sont conscients des limites de cet état d’esprit, mais comment en sortir ?

Le dirigeant doit clarifier autant que faire ce peut ce qui relève de la ligne directrice et des décisions formelles qui doivent être exécutées d’une part, de tout ce qu’il attend comme prise d’initiatives du terrain d’autre part. Pour cela, il ne répète jamais suffisamment les orientations stratégiques qui sont les siennes. Il laisse souvent trop de flou sur les points sur lesquels il attend une discipline sans faille, par rapport à ceux sur lesquels il souhaite que soit prise une marge de manœuvre. De plus, il doit refuser de prendre les décisions qui ne sont pas de son champ, pour pousser ses collaborateurs à proposer et prendre leurs responsabilités.

Mais il doit aussi être vigilant à son vocabulaire. À chaque fois qu’il dit qu’il n’aime pas quelque chose, que telle autre lui déplait, qu’il est insatisfait, il invite en creux ses collaborateurs à lui plaire. Ses commentaires doivent se centrer sur l’efficacité, le sens, le lien avec la stratégie mais sans trop insister sur ses préférences propres.

Enfin, autant que possible, il ne doit pas trop montrer ses sympathies et ses inimitiés vis-à-vis de ses collaborateurs. Car c’est une façon de créer une compétition pour capter son affect.