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Imposer le changement ou le susciter par la concertation

Aux questions sur la mise en oeuvre de ses engagements, lors de sa conférence de presse, le président de la République a répondu que sa méthode était la concertation. Il attend des résultats des négociations entre les intéressés, notamment sur la réduction des strates régionales. Dans les jours qui ont suivi, les responsables régionaux (presque tous socialistes), à commencer par le Premier ministre, se sont déclarés favorables à la démarche mais opposés sur leur propre territoire sauf à mettre des conditions qui rendent l'opération inacceptable pour l'autre partie. Le résultat semble donc assez aléatoire.

L'entreprise est, elle aussi, confrontée à cette question : conduire le changement en l'imposant ou le faire émerger par la concertation. Chacun a pu constater que la seconde option est toujours la plus satisfaisante dans la durée. Les acteurs prennent le temps de s'approprier le diagnostic qui conduit à décider du changement, puis réfléchissent aux bonnes façons de le faire et enfin s'impliquent dans sa mise en oeuvre. Au fur et à mesure de son « implémentation », ils trouvent eux-mêmes les solutions aux problèmes pratiques qu'ils rencontrent et, in fine, ressentent une fierté à avoir réussi qui renforce encore leur envie de contribuer. Mais cette méthode n'est réaliste que si les acteurs sont rassurés sur leur propre sort, que s'ils ont confiance en leur propre avenir dans la configuration future.

Sinon, le risque est connu : les intéressés passent beaucoup de temps à créer des comités dont il ne sort rien de concret et le projet se délite. Progressivement, ce dernier perd de son actualité pour être finalement abandonné, considéré comme trop compliqué. Entre-temps, de nouvelles annonces occupent les esprits et alimentent l'agitation brownienne.

Imposer par le haut est indispensable lorsque l'intérêt des acteurs ne converge pas avec la finalité du projet. La description précise du but à atteindre et la date d'aboutissement doivent être clairs et non négociables. Après, la concertation et les négociations peuvent commencer les discussions sur la façon d'y aboutir. Mais là encore, cela suppose d'avoir un cadre clair qui balise les étapes pour éviter tout débordement de calendrier souvent interprété comme une possibilité de « gagner du temps ». Enfin, il est nécessaire d'aborder le plus en amont possible le sort des cas particuliers de façon à limiter une incertitude anxiogène qui conduit au contre- jeu.

Reste la crédibilité du dirigeant dans sa détermination à faire aboutir le changement coûte que coûte. Au moindre doute, le flottement s'installe et les discussions s'engagent non pas sur le comment faire mais sur le but lui-même. Faire aboutir des projets de changement est un subtil va-et-vient entre imposer et concerter.