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Le lent poison nostalgique

La nostalgie est douce. Qui ne s’est pas surpris à cette évocation idéalisée du passé ? Le tri sélectif de la mémoire ne laisse émerger que les bons moments, vécus, par définition, à un âge plus jeune. Chacun peut évoquer ce qui lui tenait particulièrement à coeur et qui n’existe plus…

La France s’est fait une spécialité de cet exercice. Au point que c’est le ressort principal de certains partis politiques qui voient ainsi leur audience monter.

En entreprise, la nostalgie prend diverses formes, de la simple évocation du passé sur le thème « c’était le bon temps » à l’indignation face à tout ce qui a été perdu.

Quelle que soit sa forme, la nostalgie aboutit toujours à la résistance au changement parce que son mécanisme est de projeter la capacité à rêver dans le passé et non plus dans le futur. A force de la pratiquer, tout ce qui devient nouveau et qui, donc, rompt avec le passé est jugé inquiétant. L’énergie est alors mise dans le refus du présent et de l’avenir, ou dans la quête de ce qui est révolu et idéalisé. Mais à se laisser aller à une telle attitude, on finit par dégrader sa propre image de soi : on ne se fait plus confiance dans sa capacité à s’adapter à l’avenir et à en tirer bénéfice.

La responsabilité des dirigeants est de montrer pourquoi ce qui a été réalisé dans le passé donne des atouts pour aborder l’avenir. Mais c’est aussi de projeter les acteurs de l’entreprise dans un avenir qui donne des perspectives, qui ouvre des opportunités.

Nous avons la chance de vivre la période la plus stimulante de l’humanité. Jamais le champ des possibles n’a été aussi ouvert.

Que rêver de mieux pour une entreprise, quel que soit son domaine d’activité ?

Aux dirigeants de transmettre ce souffle et leur optimisme, comme l’a fait Warren Buffett récemment. Cela suppose de commencer par montrer en quoi ce qui a fait leur propre succès et celui de l’entreprise est admirable mais daté. Ce ne sera pas ce qui assurera l’avenir. Jamais les ressorts de l’efficacité n’ont évolué aussi vite. Transformer la nostalgie en optimisme et donner de l’appétence pour l’évolution du monde est une clef du leadership d’aujourd’hui.